Deux conceptions de la santé peuvent s'opposer et aussi se complèter, le traitement et la prévention des maladies, ou la recherche d'un mieux-être individuel
La réussite professionnelle d’André était exceptionnelle. Avec sa vision aigue des besoins du marché, une organisation du travail bien huilée et travail acharné, ce DG a su construire en quelques années un réseau de distribution qui a assuré une croissance forte et durable de l’entreprise. André était le type de leader sans cesse sollicité par des chasseurs de tête qui lui proposaient la direction d’entreprise plus importantes, tout en doublant ses revenus déjà fort confortables. A 30 ans André avait réalisé bien plus que ce qu’il avait pu imaginer lors de ses études dans une école de commerce. La vie d’athlète des affaires d’André s’arrête brutalement, le jours ou il se précipite à la clinique pour assister à la naissance de son deuxième enfant. Il s’effondre brutalement dans le hall de la clinique, du fait d’un brutal arrêt cardiaque. Sa chance est de mourir pas loin des réanimateurs de la clinique. Après quelques semaines de soins intensifs, de rééducation et de repos, les médecins le déclarent guéri et en mesure de reprendre une activité professionnelle. Compte tenu de la gravité de l’infarctus, les cardiologues se félicitent du résultat. André ne se sent plus malade, mais ses longs mois d’inactivité lui ont fait prendre conscience des nombreuses insatisfactions de sa vie. Plutôt que de reprendre immédiatement sa vie professionnelle, il décide de suivre un travail de développement personnel, et se faire accompagner par un coach de santé pour imaginer quel sens nouveau il pourrait donner à sa vie.
L’exemple d’André reflète en grande partie le mode fonctionnement de notre système de santé actuel. La médecine moderne sauve quotidienement de nombreuses vies, soulage bien des maux, mais n’arrive pas à elle seule à créer un changement durable dans la santé et le sentiment de bien-être des individus. Comme le dit l’OMS, la santé ne se définit pas par l’absence de maladie, mais aussi par un sentiment de bien-être physique, mental, émotionnel.
Le Continuum Maladie-Bien-être de John W. Travis
John W. Travis (1) est un médecin américain partisan du concept des médecines alternatives et complémentaires du bien-être. Dans les années 1970, Travis a fondé le premier "centre de bien-être" en Californie. Il a été un professeur de « bien-être » à l’université australienne du RMIT (2) et il est depuis 1975 le concepteur et le développeur du Continuum Maladie-Bien-être, représenté dans le schéma ci-dessous.
Travis considérait qu'une approche médicale reposant sur la présence ou l'absence de symptômes de maladie était insuffisante pour répondre aux besoins de bien-être des individus. Sur le schéma du Continuum, le côté droit reflète les différents degrés de bien-être, tandis que le côté gauche montre les degrés de maladie qui aboutissent à une mort prématurée. La zone centrale est dite « neutre » et c’est une zone dans laquelle une personne peut n’avoir ni maladie, ni bien-être. Le modèle de Travis montre comment une personne, en l'absence de maladie physique, peut ne pas ressentir de bien-être du fait de problèmes psychologiques tels que la dépression, l'anxiété ou bien d'autres troubles.
Travis considérait que l’approche médicale conventionnelle obéit à un paradigme thérapeutique qui traite et soulage les blessures, les handicaps et les symptômes, pour amener l'individu jusqu’à un "point neutre" dans lequel il n'y a plus de maladie objectivement visible. Le paradigme du bien-être exige de plus de faire progresser le sujet le long du continuum vers des états émotionnels et mentaux optimaux de bien-être. Si le paradigme thérapeutique suppose que la santé est quelque chose de statique à maintenir et à préserver, le paradigme du bien-être conçoit la santé comme un processus dynamique, en constante évolution. Ce qui signifie que nous sommes dotés d’un potentiel de développement de nos niveaux de santé et bien-être.
Le continuum maladie-bien-être de Travis suggère que les individus peuvent se déplacer le plus loin possible vers la droite, vers de plus hauts niveaux de santé et de bien-être, en passant par les étapes de la prise de conscience, de l'éducation et de la croissance.
Travis souligne que l’attitude d'une personne peut grandement impacter son niveau de santé et de bien-être. Une attitude positive peut améliorer la santé et le bien-être, alors qu'une attitude négative y fait obstacle, indépendamment de l'état de santé physique actuel de la personne. Selon le paradigme du bien-être, une personne qui ne présente aucun symptôme de maladie, mais qui se dit malheureuse, se situera du côté gauche du continuum et s'éloignera des hauts niveaux d’état de bien-être. À l'inverse, une personne handicapée, mais qui garde une attitude positive, se trouvera vers la droite en direction de hauts niveaux de bien-être. Le positionnement d’une personne sur le continuum est donc bien moins important que la direction vers laquelle elle se tourne.
Selon le continuum maladie-bien-être de Travis, le développement du niveau de conscience et d’éducation des individus à propos des facteurs de risque des maladies, favorise grandement les mesures de prévention, peut contribuer à prévenir une mort prématurée et accroitre ainsi le potentiel de développement du niveau de bien-être de la personne. Le concept de Travis a été appliqué à divers domaines tels que la médecine (3,4) les soins infirmiers (5,6), la physiothérapie (7) la santé publique (8) et le développement des organisations (9).
Une évolution des modèles de santé
Dans la plupart des pays, la formation des professionnels de santé est encore très orientée sur le traitement et la prévention des maladies. Les nouvelles explorations systématiques du génome humain vont dans le même sens, en tentant d’identifier les gènes associés à des états pathologiques, afin de trouver les moyens les plus précoces possibles de prévenir l’apparition des maladies. A ma connaissance je n’ai pas vu de travaux recherchant les gènes, s’ils existent, associés au bonheur, à la joie et au bien-être. La pratique des professionnels de santé montre également une orientation encore très forte vers le côté gauche du continuum, c’est-à-dire vers l'identification des risques, le traitement des symptômes, et la prévention des maladies. Cette orientation quasi obstinée de la recherche médicale vers la maladie a été la source de grandes découvertes thérapeutiques. Celles-ci permettent à des personnes souffrant de maladies considérées autrefois comme « sans solutions » ou « mortelles », de retrouver l’état "neutre", ni malade ni bien portant, de la vie antérieure.
Comment expliquer que cette focalisation prioritaire sur la maladie soit encore si présente dans les systèmes de santé ? Les réponses se trouvent probablement dans l’histoire récente de la médecine. Nos grands-parents ou arrières grands parents pourraient nous raconter qu’au début du siècle dernier on mourait principalement de maladies aigues, infectieuses ou traumatiques. La mortalité infantile était élevée, on mourait d’appendicite, et la première guerre mondiale a été une hécatombe. Le progrès scientifique se devait d’être au service des besoins prioritaires de la médecine, et aussi des nouvelles ambitions industrielles et économiques. La recherche médicale s’est peut-être laissée aveuglée par ses formidables découvertes, et maintenu ainsi son orientation vers le traitement et la prévention de ces maladies. Le bien-être global, promis par la définition de l’OMS en 1948 ne pouvait être atteint que par l’éradication des maladies. Soyons reconnaissant envers cette recherche qui a permis de si nombreuses révolutions thérapeutiques, tout en reconnaissant ses limites. De nos jours, les produits de l'orientation "maladie" sont perçus comme insuffisants pour améliorer de façon efficace et durable notre état de santé et notre niveau de bien-être. Comment expliquer que nous souhaitons de nos jours bien plus que de ne plus être malades ?
L'une des raisons principales est que de nos jours les enjeux médicaux sont bien différents de ceux du début du siècle dernier. Nous mourons maintenant beaucoup moins de maladies aigues, et bien plus des conséquences des maladies chroniques, ou « de longue durée ». En partie du fait du vieillissement de la population et surtout d’un style de vie peu compatible avec un bon niveau de santé et bien-être. La plupart des décès sont dus à une ou parfois plusieurs maladies chroniques. Si la génétique et les déterminants sociaux et environnementaux peuvent jouer un rôle dans l’apparition des maladies chroniques, les véritables causes relèvent de nos comportements à risque, par exemple une alimentation malsaine, l’inactivité physique, le tabagisme et la consommation d'alcool, le stress et le surmenage, le manque de sommeil, etc. Nous choisissons donc consciemment ou inconsciemment d’adopter des comportements qui contribuent de manière significative à l’apparition de maladies chroniques qui peuvent nous tuer prématurément.
La plupart des individus ont conscience des conséquences néfastes pour leur santé des comportements à risque qu’ils ont choisi. Mais la connaissance des risques, même pour les professionnels de santé, reste clairement insuffisante pour changer les habitudes de vie qui nous permettront de nous sentir en bonne santé et bien dans notre peau. Nous savons ce que nous devrions faire, mais nous ne savons pas trouver l’énergie pour le faire. Et pourtant, pour des raisons sanitaires et aussi économiques, nous devons apprendre à le faire. Les progrès de l’hygiène, de la vaccination et de la médecine ont permis d’allonger grandement l’espérance de vie, mais à quel prix ! Les maladies chroniques explosent dans la plupart des pays, menaçant la survie financière des systèmes de santé. L’enjeu majeur de nos sociétés est de permettre à un maximum de personnes de vieillir tout en maintenant une bonne santé physique et mentale. L’explosion des maladies chronique est en partie due au vieillissement de la population, mais avant tout aux styles de vie inappropriés et parfois incompatibles avec une bonne santé. Et ces pathologies chroniques ont un impact financier important dans le budget de la sécurité sociales, puisqu’en France près de 70 % des dépenses de santé sont dues à des maladies chroniques qui ne cessent de croître.
Une évolution des modes de pensée
Comme nous l’avons vu, l’orientation des systèmes de soin vers la maladie vont vous permettre au mieux de vous ramener au point mort. Les professionnels de santé auront soigné des dégâts de votre corps, mais certainement pas les modes de pensée qui les ont produit. Nous sommes culturellement presque conditionnés à porter notre attention sur ce que nous ne voulons pas et ce qu’il faut prévenir (la maladie) plutôt que sur ce que nous voulons vraiment (le bien-être). Par l’orientation de notre pensée, nous indiquons à notre inconscient ce qui doit être recherché dans notre vie. Si la maladie que vous voulez éviter occupe une grande partie de vos pensées, vous contribuez à vous programmer bien inconsciemment à l’obtenir. Nous obtenons de manière prévisible le résultat de nos efforts inappropriés de changement de comportement. Si vous vous répétez à longueur de journée que vous voulez arrêter de boire, de fumer, de grossir, d’être sédentaire et stressé, vous informez vos représentations mentales de l’objet de vos recherches, c’est-à-dire boire, fumer, grossir, être sédentaire et stressé.
Le passage d’une orientation mentale « évitement des maladies » vers une orientation « aller vers plus de bien-être » peut amener à des changements durables d’états internes de « bien-être », qui peuvent parfois se répercuter sur l’état physique. Et cela quel que soit le stade de la maladie dans lequel une personne peut se trouver. Une personne atteinte d’un cancer incurable peut trouver des moyens d’améliorer sa qualité de vie et son bien être émotionnel. Nous n’avons pas besoin d’être malade pour commencer à changer l’orientation de nos pensées. Même si vous vous considérez en bonne santé physique, vous pouvez agir pour améliorer votre niveau de bien-être général.
Le rôle des coachs de santé et bien être
Les coachs de santé et de bien-être, indépendamment d’un état physique, aident leurs clients à réorienter leurs pensées vers leurs sources de bien-être. Ils s’adressent à ceux qui veulent créer des changements durables dans leur vie, afin d’obtenir une vie plus satisfaisante. Pour cela ils questionnent leurs clients sur leur vision, leur rêve, leurs valeurs, et tout ce qu’il leur donne le sentiment d’être plus vivant et plus en lien avec la vie qu’ils veulent mener. Ils questionnent également les croyances qui peuvent faire obstacle à la réalisation des buts de vie, et sauront faciliter leur transformation en croyance qui soutiennent le développement de la santé et du bien-être. Le coach de santé n’est pas un professionnel de santé, il ne fait pas de diagnostic et ne prescrit pas. C’est un professionnel du mieux-être qui aide son client à actualiser, enrichir et réorienter les cartes mentales qui ont pu contribuer à la création des habitudes de vie malsaines et leurs conséquences pathologiques.
John W. Travis a représenté sous forme d’un iceberg, le champ d’intervention de ceux qui accompagnent leurs clients vers plus de santé et de bien-être. La partie émergée de l’iceberg représente ce qui est observable et mesurable d’un niveau de santé et bien-être d’une personne (les aspects pathologiques, physiologiques, biologiques, génétiques et moléculaire) ; alors que la partie immergée de l’iceberg représente tout ce qui dans les profondeurs de l’inconscient conditionne les niveaux de santé et bien-être de la surface. Notre santé physique et mentale, dépend des comportements sain ou malsains qui se transforment en styles de vie ; ces styles de vie sont sous la dépendance de facteurs psychologiques (modes de pensée et facteurs de motivation, les croyances spirituelles et la raison d’être) et ces derniers dépendent également de l’idée de qui nous sommes (identité) et du monde auquel nous voulons appartenir (sens et spiritualité).
Le coach de santé et bien-être accompagne son patient dans une plongée exploratoire vers les facteurs d'influence inconscients qui ont pu initier et maintenir les modes des styles de vie inappropriés. La santé est un processus, c’est-à-dire la capacité à faire face et à nous adapter aux épreuves de la vie, afin de poursuivre nos buts de vie. Le niveau de bien-être mesure l’efficacité de ce processus, et n’est donc jamais acquis une fois pour toute. C’est un processus constant qui part d’une décision, qui exige des efforts et qui implique un soutien relationnel important. Les sources de santé et bien-être comme les obstacles à leur réalisation se trouvent le plus souvent dans nos histoires individuelles et dans leurs aspects les plus inconscients. Ramener à la surface ces aspects immergés de l’expérience humaine, implique l’accompagnement d’un professionnel compétent et rassurant. Dans une vision systémique, les schémas cognitifs et comportementaux peuvent se réorganiser pour répondre de mieux en mieux aux critères de bien-être de la personne. Cette quête de bien-être doit être comprise comme un cheminement et non pas comme une destination. Si le bien être est un état naturel à la naissance, nous l’avons vite perdu par notre confrontation au monde et nous devons faire preuve pas mal de flexibilité pour apprendre à le retrouver dès que nous en avons besoin. Et c’est bien l’objectif du coaching de santé et bien-être : faciliter l’autonomie et la responsabilisation des clients dans la construction de stratégies mentales qui vont assurer l’efficacité des changements de style en matière de santé, et permettre de mener la vie souhaitée. Le bien-être mesure l’efficacité de ce processus à répondre à nos aspirations les plus profondes. Car nous le sentiment de prendre notre vie en main. Le coaching santé et bien-être est un agent de changement individuel et aussi collectif. Par sa pratique, il contribue à faire passer la culture des soins de santé, de la dépendance à la responsabilisation.
L’action des coachs en santé et bien-être est totalement complémentaire de celle des professionnels de santé. Les coachs ont leur place dans le continuum des soins de santé et ont aussi leur place dans des équipes de soin pluridisciplinaires. Dans le coaching de santé et bien-être, les moyens ne sont pas techniques mais humains et relationnels. Si le médecin peut avoir une bonne prévisibilité de l’efficacité d’un médicament, ce n’est pas le cas dans le coaching de santé. Le coach de santé propose un processus de découverte et d’action, ainsi qu’un cadre relationnel, la décision d’en faire le meilleur usage appartient au client. Il n’y a pas de résultat possible sans sa décision et sa participation active. Le processus est valable, puisque de nombreuses recherches montrent que le coaching en santé et bien-être constitue une intervention efficace dans l’amélioration comportementales et clinique de maladies chroniques (10). Le coaching de santé et bien-être est une nouvelle profession qui peut jouer un rôle essentiel dans l’amélioration de notre santé. En Amérique du Nord, de plus en plus d’entreprises soucieuses du bien-être de leurs salariés font appel aux coachs de santé et bien-être. Les entreprises nationales ou privées d’assurances maladies y voient des sources importantes d’économies.
Revenons à l’histoire d’André évoquée au début de l’article. André a pris conscience que sa réussite professionnelle avait pleinement satisfait son égo, mais l’avait éloigné de ses aspirations profondes, sur lesquelles il n’arrivait pas à mettre de mots. Avec l’aide de son coach de santé, André a réalisé que ses principales sources de bien-être étaient ses enfants, et une activité dans laquelle il pouvait aider les autres à grandir et se réaliser. Il a réorganisé sa vie pour devenir enseignant et passer bien plus de temps avec ses enfants. Son niveau de revenu a grandement baissé, la santé de son cœur lui permet de réaliser de nombreuses activités sportives, et sa nouvelle vie lui apporte bien plus de satisfactions que la précédente.
Une vision sociale et économique du bien-être
La recherche de bien être peut-être abordé au niveau individuel mais aussi au niveau collectif, et de nombreux pays tentent de la mesurer. Près d’un demi-siècle après son invention au Bhoutan, le Bonheur national brut (BNB), indicateur qui mesure le bien-être d’une population, s’est substitué au Produit intérieur brut (PIB), outil de mesure traditionnel de la santé économique d’un pays.
L’idée clé est de mesurer le niveau de bonheur plutôt que la richesse, puisque celle-ci n’est pas synomyme de bonheur. Le calcul du BNB du Bouthan repose sur quatre critères : "croissance et développement économique", "conservation et promotion de la culture", "sauvegarde de l’environnement et utilisation durable des ressources" et "bonne gouvernance responsable".
L’OCDE a créé en 2011 le BIB ou Bonheur Intérieur Brut (11), un indicateur qui agrége onze thématiques (logement, emploi, santé, sécurité, éducation, environnement…) et établi un classement des pays où il fait "bon-vivre". En 2016, c’est la Norvège qui avait été élu "pays du bonheur", devant l’Australie et le Danemark. La France, elle, n’était que 18ème (sur 38 pays classés). Dans le même esprit, des chercheurs sont missionnés par l’ONU chaque année pour établir un rapport annuel du bonheur sur des critères similaires. En 2018, c’est en Finlande qu’on est le plus heureux, devant la Norvège et le Danemark (la France est 23ème).
En France, la note de l’observatoire du bien-être (12) du centre pour la recherche économique et ses applications déclare « En balayant un vaste ensemble d’indicateurs, nous mettons à nouveau en évidence une forme de pessimisme et de mal-être français. Les évaluations que donnent les Français de leur situation sont presque toujours plus sombres que ce que voudrait le positionnement du pays sur des métriques objectives. Cet écart est révélateur des craintes comme des aspirations des Français. » Ce rapport montre que les Français ont une opinion un peu plus négative de leur santé que les autres pays européens à l’espérance de vie similaire, et place la France parmi les pays de l’OCDE relativement peu touchés par la dépression, mais parmi les plus affectés par les troubles anxieux.
Le système de santé français est performant, couteux, envié par de nombreux pays, et ne semble pourtant pas en mesure de freiner l’explosion des maladies chroniques, ni de répondre au mal-être des Français. Les français attendent probablement autre chose que la santé de leur corps. Est-ce une des raisons du recours massif aux médecines complémentaires et alternatives. Comme si bien des patients avaient compris intuitivement que leur médecin était bien plus en mesure de soigner leur corps que leur âme. Ce à quoi les professionnels de santé ne peuvent répondre, sera recherché dans toute une série de pratiques dites non conventionnelles, telles que l’acupuncture, homéopathie, magnétiseur, naturopathe, shamanisme, les bols tibétains, les coupeurs de feu..., pour le meilleur ou le pire.
La richesse des analyses sur le niveau de bien-être des populations montre qu’il existe bien une prise de conscience des institutions et des professionnels de santé sur ce sujet. Les solutions ne sont pas simples, car le bien-être ne peut se prescrire ni individuellement, ni collectivement. Comme nous l’avons vu, le bien-être se décide de l’intérieur et ne peut dépendre d’une décision politique. Une santé orientée bien-être implique une approche individualisée, car elle touche l’expérience intime, l’histoire individuelle de la personne, et échappe donc aux approches standardisées de la médecine conventionnelles. La consultation médicale est certainement le lieu privilégié pour initier une démarche de santé orientée bien-être, en plus de celle orientée maladie.
La santé est au service du bonheur, et non l’inverse
De nombreux professionnels de santé reconnaissent que leurs patients auraient besoin d’un temps d’écoute bien plus long que celui autorisé par leur mode de rémunération. Même s’ils ne peuvent accorder le précieux temps d’écoute, ils ont la crédibilité et la légitimité pour inviter leurs patients à poursuivre leur chemin de santé et de bien être auprès de professionnels compétents. Je parle ici de professionnels de l’accompagnement formés aux techniques spécifiques du coaching de santé. Un des obstacles majeurs à la généralisation de la pratique du coaching de santé et de bien-être, est sa prise en charge par les systèmes de soin. Les décisions récentes de remboursement des consultations des psychologues témoignent d’une vision bio-psycho et sociale de la santé. Le coaching de santé et bien-être s’adresse à tous et en premier aux professionnels de santé, une population dont la souffrance n'a fait que se renforcer avec la pandémie du Covid. L’exemple que les professionnels de santé peuvent donner dans leur pratique de l’intégration des deux paradigmes (thérapeutique et bien-être) constitue le plus puissant message de santé qu’on puisse adresser à ses patients. Et puis un professionnel de santé en bonne santé est certainement plus en mesure de fournir des soins de santé efficaces à ses patients.
Cet article a pour but de contribuer, bien modestement, au changement de paradigme dont des systèmes de santé ont besoin. Un changement dans lequel il n’y a rien à soustraire, mais à ajouter. Le paradigme du bien-être de John Travis est en mesure d’inclure et transcender, voire décupler la performance du paradigme thérapeutique. Nous savons que la performance médicale est à la hauteur de la volonté de vivre des patients. La réparation des organes et des corps n’est pas une fin en soi, mais un moyen de permettre aux patients de vivre une vie plus satisfaisante et plus heureuse.
On a fait dire à Voltaire, grand hypocondriaque qui a vécu jusqu’à 83 ans « J’ai décidé d’être heureux, parce que c’est bon pour la santé » C’était probablement de l’humour à la Voltaire. Car ce dernier partageait avec Aristote l’idée que le but de toute vie est la recherche de bonheur. La santé est au service du bonheur, et non l’inverse. Et en même temps Voltaire reconnaissait que la décision d’être heureux peut largement contribuer à notre santé, et la recherche médicale lui donne raison..
Jean Luc Monsempès 26 octobre 2021
Sources
- John W. Travis Wikipedia; https://en.wikipedia.org/wiki/John_Travis_(physician)
- John W. Travis Adjunct Profess John Travis, RMIT University Australia ; https://web.archive.org/web/20130521030633/http://www1.rmit.edu.au/staff/john-travis
- To Your Health: Achieving Well-Being During Medical School. Thomas M. Wolf (18 August 2000).SAGE Publications. pp. 18–. ISBN 978-1-4522-6760-9.
- Fundamentals of family medicine. Robert B. Taylor (January 1983). Springer-Verlag. pp. 10–. ISBN978-0-387-90705-5.
- Lewis, Emily."Understanding the Health Continuum: A Guide for Nurses". education-portal.com/. Retrieved 25 August 2014.
- Community health nursing"(PDF). Mengistu, Daniel www.cartercenter.org/. pp. 14–16. Retrieved 25 August 2014.
- Wellness and Physical Therapy. Sharon Elayne Fair (22 October 2010).Jones & Bartlett Publishers. pp. 9–. ISBN 978-1-4496-1034-0.
- Improving Outcomes in Public Health Practice: Strategy and Methods. G. E. Alan Dever (1 January 1997). Jones & Bartlett Learning. pp. 18–. ISBN978-0-8342-0637-3.
- Operations and Management Principles for Contact Centres. Dennis Farrell; Neil Lilford; Mariaan Ellis (1 September 2008). Juta and Company Ltd. pp. 151–. ISBN978-0-7021-7704-0.
- Le coaching de santé est efficace, Jean-luc Monsempes, Mar 2021 ; publié sur le site coaching-santé.nethttps://www.coaching-sante.net/ressources/articles/coach-de-sante/le-coaching-de-sante-est-efficace.html
- OCDE : L’émergence du « bonheur national brut », entretien avec Romina Boarini, La santé en action, Mars 2017 sur le site de Santepubliquefrance.fr
- Le Bien-être en France : Rapport 2020, Mathieu Perona (dir.) et Claudia Senik (dir.) Publication de cepremap. http://www.cepremap.fr/publications/le-bien-etre-en-france-rapport-2020/