Le pardon est bon pour la santé et la longévité

Le pardon est bon pour la santé et la longévité

Pardonner pour être en meilleure santé et vivre plus longtemps

La question du pardon est morale, religieuse et philosophique, mais intéresse également notre santé comme le montre plusieurs études scientifiques. Les résultats de ces études plaident en faveur de l'intégration du pardon dans certains traitements médicaux.

Une méta-analyse sur les effets physiques du pardon 

L’étude de Lee & Enright (1) est la première méta-analyse portant sur la relation entre le pardon aux autres et les résultats en matière de santé physique. Pour plusieurs raisons, il n’est pas simple de montrer la relation entre le degré de pardon et le degré de santé physique. 
La première raison vient du fait que la majorité des études sont corrélationnelles et non expérimentales (interventionnelles). Dans ce dernier cas les changements physiques ne sont observés qu'après l'amélioration du pardon. La deuxième raison vient du grand nombre de variables physiques étudiées. Plus ces variables sont nombreuses (cardiaques, douleur, sommeil ...), plus il est difficile de savoir celles qui sont le plus impactées par le pardon et qui peuvent déboucher sur des mesures médicales concrètes.  La troisième raison concerne ce qui est évalué dans l’acte du pardon : des pensées, des émotions ou des comportements à l’égard de celui qui est pardonné. 

Les 136 comparaisons réalisées par Lee et Enright (1), ont permis de rechercher des corrélations entre le degré de pardon et les variables physiques suivants (à titre d’exemple car toutes ne sont pas mentionnées) : Taux de cholestérol, fibromyalgie, santé cardiaque, risque cardiovasculaire, fréquence cardiaque, symptômes liés au VIH, hypertension, lupus, douleur physique, qualité du sommeil. 

Malgré le nombre important de variables, les auteurs disent avoir été surpris de la corrélation statistiquement significative observée entre le pardon (quelle que soit son mode d’évaluation) et la santé physique (quel que soit la nature du problème physique). La puissance statistique des résultats s'est avérée être de 1,00, ce qui est considéré comme un résultat fort. Les résultats apparaissent indépendamment de l'âge (de 12 à 106 ans, moyenne de 36,68 ans), du sexe, des facteurs ethniques, du niveau d'éducation ou du statut professionnel. « Une corrélation de 0,14 est faible, mais elle indique une réalité statistique selon laquelle plus les gens pardonnent, plus ils sont en bonne santé dans un sens large et général. » 

Des mises en évidence de la relation causales 

Les auteurs rappellent que les corrélations ne prouvent pas que le fait de pardonner entraîne une amélioration de la santé physique. La relation de cause à effet doit en effet être démontrée.  Deux études interventionnelles randomisées avec groupe témoin montrent que la santé physique des personnes qui apprennent à pardonner s'améliore. La première étude (2) a examiné chez 24 hommes hospitalisés en cardiologie, l’impact du pardon sur la fraction d'éjection (la quantité de sang qui circule dans le cœur et qui a tendance à diminuer lors d’un stress important) diminuée chez l’ensemble des participants. Le groupe expérimental bénéficiait d'une intervention de pardon, et le groupe témoin recevait une éducation thérapeutique habituelle sur la santé cardiaque. L’évaluation finale comportait un rappel des circonstances dans lesquelles ils avaient été traités injustement. Les résultats montrent que les hommes du groupe expérimental (qui ont appris à pardonner), ont eu un flux sanguin cardiaque statistiquement plus important que celui des sujets témoins. « Les hommes du groupe expérimental n'ont pas vu leur cœur revenir à la normale, mais l'intervention de pardon les a probablement aidés à éviter les douleurs thoraciques et la mort subite ». Cette étude est la première à avoir montré que le pardon a un effet positif sur le fonctionnement du cœur. 

La deuxième étude (3) expérimentale a montré l’impact du pardon sur la diminution statistiquement significative des symptômes de fibromyalgie, par rapport aux participantes du groupe de contrôle, chez des femmes abusées d'une manière ou d'une autre dans leur enfance. 

L’impact du pardon sur la mortalité 

La recherche montre que le fait de pardonner aux autres est associé à une meilleure santé physique générale. Et deux études contrôlées montrent la relation de cause à effet entre le fait de pardonner aux autres et le fait d'être en meilleure santé physique. Il restait à démontrer l’impact du pardon sur les taux de mortalité. L’étude de Loren L Toussaint, Amy D Owen (4) dans une étude portant sur plus de 1 200 personnes âgées de plus de 65 ans montre bien que le pardon nous aide à vivre plus longtemps.

Pour son analyse, les auteurs ont utilisé les données de l'enquête Religion, Aging and Health Survey, réalisée par l'Université du Michigan. Cette enquête a permis de recueillir des données sur les tendances spirituelles, les sentiments de pardon et la santé des Américains de plus de 65 ans, qu'ils soient chrétiens, déchus ou athées de naissance.

Les résultats montrent que la croyance en un dieu qui pardonne, et surtout la volonté de pardonner aux autres réduisaient la mortalité. Plus le coefficient de corrélation est élevé dans le tableau ci-dessous, plus l'effet protecteur est fort. Sur le schéma ci-dessous, les astérisques montrent des effets statistiquement significatifs. Les auteurs ont ainsi pu démontrer qu'une attitude de pardon envers les autres améliore la santé, et qu'une meilleure santé réduit le risque de mourir.

forgive

Loren Toussaint fait une distinction entre le pardon conditionnel et le pardon inconditionnel.
Le pardon conditionnel consiste à pardonner à une personne qui considère elle-même avoir commis un acte injuste ; cette prise de conscience n'est pas nécessaire lorsque le pardon est inconditionnel.
Le pardon inconditionnel consiste à pardonner à une personne ou une institution qui ne reconnaît pas sa responsabilité ou culpabilité. C'est par exemple ce que certains chefs religieux peuvent exiger des personnes qui ont été abusées par des prêtres dans leur enfance. Cette hiérarchie religieuse n’a rien fait pour empêcher les coupables de vaquer à leurs occupations, et n’était pas prête à prendre des mesures pour montrer l'échec de l’Église prévenir les pratiques pédohiles. Le message restait  « vous devriez pardonner les prêtres pédophiles. » Selon Toussaint, l’effet sur la santé fonctionne avec le pardon conditionnel, le pardon inconditionnel n'ayant aucun effet.

Commentaire pour les coachs de santé 

A la lumière des résultats des études citées, apprendre à pardonner peut améliorer la santé physique.

Il est certainement temps de considérer la thérapie du pardon comme faisant partie du traitement de nombreuses maladies, et certainement des affections cardiovasculaires. Pour cela l’examen médical devrait passer en revue les injustices passées dont les patients ont été victimes et déterminer dans quelle mesure ils continuent à nourrir une colère excessive qui peut être atténuée par le pardon. 

On ne sait pas encore la raison pour laquelle le pardon protège une personne des maladies liées au stress. Les chercheurs suggèrent que la capacité à pardonner pourrait être associé à une meilleure capacité d’adaptation et à une meilleure gestion du stress. Ce que l’on sait est que le pardon est un processus qui s’apprend et se travaille. 

Il faut surtout connaître les deux étapes clés du processus de pardon. 
a) Le pardon décisionnel, c’est décider de façon sincère de modifier son attitude face à une personne qui vous a fait du tort, même si vous nourrissez pour elle des sentiments négatifs.  Il convient d’expliquer que le pardon ne signifie pas excuser l’autre de ce qu’il a fait, mais que c’est décider de ne plus se faire du mal avec ce que l’autre a fait. Mais la décision seule ne suffit pas. 

b) Le pardon émotionnel consiste à remplacer les ressentis négatif éprouvés vis-à-vis d’une personne par une émotion positive telle que l’empathie, la sympathie, la compassion, voire l’amour. Cette étape consiste à reconnaître l’intention positive de chaque acte, puis à donner à l’autre (l’autre en moi qui a été introjecté) les ressources qui ont fait défaut à l’agresseur, et qui m’ont moi-même fait défaut en tant qu’agressé. 

Sources

  1. A meta-analysis of the association between forgiveness of others and physical health; Yu-Rim LeeRobert D. EnrightPsychology & Health; Volume 34, 2019 - Issue 5Pages 626-643 | Received 13 Oct 2017, Accepted 26 Nov 2018, Published online: 22 Jan 2019 https://doi.org/10.1080/08870446.2018.1554185
  2. The effects of a forgiveness intervention on patients with coronary artery disease; Martina A Waltman1Douglas C RussellCatherine T CoyleRobert D EnrightAnthony C HolterChristopher M Swoboda ; Psychol Health. 2009 Jan;24(1):11-27. DOI: 1080/08870440903126371
  3. A Forgiveness Intervention for Women With Fibromyalgia Who Were Abused in Childhood: A Pilot Study ; Spirituality in Clinical Practice2014  1(3):203-217 DOI:1037/scp0000025
  4. Forgive to live: forgiveness, health, and longevity; Loren L Toussaint, Amy D Owen, Alyssa Cheadle; J Behav Med. 2012 Aug;35(4):375-86. doi: 10.1007/s10865-011-9362-4. Epub 2011 Jun 25. : PMID: 21706213 DOI: 10.1007/s10865-011-9362-4 ; https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/21706213/