La vérité à l'épreuve des sources d'intentions

La vérité à l'épreuve des sources d'intentions

Ce qui est considéré comme vrai dépend des intentions perçues des sources d’informations 

Les préjugés sur les intentions des sources d’information influencent la perception de ce qui est considéré comme vrai. Les résultats d’une étude montrent que ce qui est considéré comme vrai est influencé véracité d’une information étaient influencés par le fait qu'ils pensaient que la source essayait de les tromper ou de les informer., même lorsque les individus connaissaient l'exactitude factuelle d'une affirmation, leur Cette tendance se vérifie aussi bien pour les sujets politisés que pour les sujets non politisés.

Les résultats d’une recherche apportent une nouvelle compréhension de ce qui peut être perçu comme vrai ou faux, en montrant que l'exactitude objective n'est pas le seul critère pris en compte.

1) La perception de l'intention d'une source, qu'elle soit informative ou trompeuse, influence le jugement des individus sur la véracité d'une affirmation.
2) Cette influence persiste même lorsque les individus ont une connaissance claire de l'exactitude factuelle d'une affirmation.
3) Des divergences dans les intentions attribuées aux sources d'information pourraient conduire à des désaccords sur la véracité des affirmations, même lorsque les individus partagent le même ensemble de faits.

Des psychologues du Boston College ont réalisé des expériences qui montrent que lorsque les Américains prennent en compte les intentions de la source d'information, pour décider si une affirmation doit être qualifiée de vraie ou de fausse. La confiance accordée à l’information repose avant tout sur les intentions perçues de la source d’information, ou ce que les individus pensent que la source tente de faire, dans ce cas, informer ou tromper son public.

"Même lorsque les individus connaissent précisément le degré d'exactitude ou d'inexactitude d'une affirmation, le fait qu'ils considèrent cette affirmation comme vraie ou fausse dépend des intentions qu'ils attribuent à la source d'information de l'affirmation", a déclaré Liane Young, professeur de psychologie et de neurosciences, l'un des auteurs du rapport. "En d'autres termes, les intentions des sources d'information influencent le jugement des individus sur les informations qui devraient être considérées comme vraies".

L'auteur principal de l’étude, The intentions of information sources can affect what information people think qualifies as true Isaac Handley-Miner, déclare que l'ère dite de la post-vérité montre un profond désaccord sur la véracité des affirmations concernant les faits, même pour les affirmations faciles à vérifier.  "Ce désaccord a alarmé notre société", car après tout, on suppose souvent que les étiquettes de "vrai" et "faux" devraient correspondre à l'exactitude objective d'une affirmation.

"Mais l'exactitude objective est-elle réellement le seul critère pris en compte par les individus lorsqu'ils décident de ce qui doit être qualifié de vrai ou de faux ? Ou bien, même lorsque les gens savent à quel point une affirmation donnée est objectivement exacte, peuvent-ils être sensibles aux caractéristiques du contexte social, telles que les intentions de la source d'information ?  "Nous avons voulu vérifier si les intentions des sources d'information pouvait influencer la décision des individus pour considérer une affirmation comme vraie ou fausse, même lorsqu'ils ont accès à la source initiale de l’information".

Qu’est-ce que la vérité vraie ?

Les chercheurs ont travaillé avec 1181 participants et ont examiné environ 16 200 réponses recueillies au cours de deux expériences.
La première, a utilisé des affirmations factuelles sur des sujets politisés tels que le changement climatique, l'avortement et la violence armée. La seconde a utilisé des affirmations également factuelles mais sur des sujets non politisés tels que la durée de vie moyenne d'une voiture et le prix d'une paire d'écouteurs.

La présentation des affirmations factuelles aux participants, était accompagnée de deux propositions concernant la source de l'information évaluée : la source de l'information voulait soit les tromper, soit les informer. Pour ce faire, les chercheurs ont modifié l'organe de presse qui avait prétendument publié l'affirmation. On a par exemple dit que l’affirmation sur le changement climatique provenait soit de Fox News, soit de MSNBC.

Puis les chercheurs ont demandé aux participants des deux expériences de décider s'ils considéraient chaque affirmation factuelle comme vraie ou fausse. 

Même si les participants connaissaient précisément le degré d'exactitude des affirmations, ils les considèrent plus souvent comme fausses lorsqu'ils estiment que la source d'information avait l'intention de les tromper. De même, ils ont classé les affirmations comme vraies plus souvent lorsqu'ils ont jugé que la source d'information avait l'intention de fournir un compte rendu approximatif plutôt que précis.

Les individus ne sont pas seulement sensibles à l'exactitude objective et factuelle des affirmations lorsqu'ils les classent comme vraies ou fausses. Bien que cette étude se soit concentrée sur l'intention de la source d'information, Young et Handley-Miner affirment que l'intention n'est probablement pas la seule autre caractéristique que les gens utilisent pour évaluer la vérité.

Les chercheurs espèrent que d’autres travaux permettront de mieux comprendre la façon dont les gens conçoivent la vérité. Du fait de la popularité croissante des modèles d'intelligence artificielle, tels que ChatGPT, les chercheurs pourraient étudier si les modèles d'intelligence artificielle de pointe "pensent" à la vérité de la même manière que les humains, ou si ces modèles s'intéressent simplement à l'exactitude objective lorsqu'ils évaluent la vérité.

Commentaires pour les coachs de santé

La prolifération des fausses nouvelles via internet et les réseaux sociaux serait responsable du basculement de nos sociétés dans l'ère de la « post-vérité », ou "post-factuelle". Le terme post-vérité a été forgé par Steve Tesich dans un article paru en 1992 dans le magazine américain The Nation et démocratisé en 2004 par le livre L’ère de la post-vérité de Ralph Keyes. En 2016, le dictionnaire britannique Oxford en a donné une définition : « circonstances dans lesquelles les faits objectifs ont moins d’influence pour modeler l’opinion publique que les appels à l’émotion et aux opinions personnelles. »

Le monde de la santé n’échappe pas à cette ère de la post vérité, comme nous l’a montré l’épisode do covid. Les sources des vérités scientifiques ne sont plus les laboratoires de recherche ou les sites gouvernementaux, mais les propos séduisants des hommes politiques, ou ceux des gourous médiatisés, ou des groupements de militants sur les réseaux sociaux. Donald Trump proposait de boire du désinfectant pour lutter contre le Covid ! Le débat sur l’efficacité de la chloroquine persiste, même si les données les plus crédibles permettent maintenant de trancher clairement. Dans une démocratie, toutes les opinions sont respectables tant que ceux qui les expriment ont conscience de faire la différence entre la subjectivité des cartes mentales et l’objectivité du territoire. La perte de cette distinction est source de souffrances chez ceux qui délivrent les fausses informations comme chez ceux qui les reçoivent et les utilisent. 

Les thèmes de la santé, de la maladie, de la guérison, nécessitent de prendre en compte autant le monde l’objectivité que celui de la subjectivité. L’objectivité médicale repose sur les résultats statistiques de la recherche scientifique et s’adresse au plus grand nombre. Les résultats des grandes études sur le rapport efficacité/risque des médicaments, des vaccins, des procédures chirurgicales…répondent aux impératifs de santé publique, afin de prendre soin au mieux de la santé des populations. Cette objectivité médicale rentre malheureusement en conflit avec la subjectivité populaire de la post-vérité. Ce conflit n’a pas de raison d’exister car l’objectivité du territoire (les vérités médicales) et la subjectivité des cartes mentales (l’opinion que l’on peut avoir des vérités médicales) n’ont pas du tout les mêmes fonctions. Les récents décrets visant à condamner les charlatans qui détournent leurs clients des traitements médicaux dont ils auraient pu bénéficier, nous le rappellent. La recherche s’adresse au « territoire » du biologique et a pour fonction grâce aux conditions expérimentales, de distinguer le vrai du faux, du moins tant que cela n’est pas remis en cause par de nouvelles données, et d’en tirer des règles applicables au plus grand nombre. La fonction des cartes mentales est de trouver une fiction ou une narration qui sera utile et bénéfique à celui qui en a besoin. Mais cette post-vérité des cartes mentales n’est qu’individuelle et en aucun cas collective. La mise en œuvre des vérités thérapeutiques « démontrés » et standardisées peuvent parfaitement cohabiter avec l’utilité des fictions ou des « post-vérités » individuelles. C’est probablement sur ces principes que se construisent et se développent les approches en santé et médecine intégrative. 

Sources d'information 

Intentions Matter: How Source Intent Influences Perceptions of Truth; News 17, 2023 ;https://neurosciencenews.com/psychology-truth-perception-23646/

The intentions of information sources can affect what information people think qualifies as true par Liane Young et al. 
Scientific Reports