Une décision consciente se prend à l'expiration

Une décision consciente se prend à l'expiration

Le libre arbitre existe t-il ou est-ce une illusion ? C’est un débat qui anime les neuroscientifiques et les philosophes depuis plus de 60 ans. Selon des scientifiques de l'Ecole polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL), nous sommes davantage susceptibles de prendre une décision volontaire au moment où nous expirons. 

Ces résultats reposent sur l’observation du «readiness potential»), ou potentiel de préparation motrice (RP), un signal d'activité cérébrale observé avant le déclenchement des mouvements musculaires volontaires, et avant que le sujet ne soit conscient de son intention d'effectuer un mouvement. Au début des années 1980, le neuroscientifique Benjamin Libet a testé de façon plus approfondie la relation entre le RP et la conscience ou l'intention d'action volontaire. Ses résultats ont montré qu'environ 200 ms avant que ses sujets n'appuient sur le bouton, ils étaient conscients d'une envie ou d'une intention d'agir, ce que Libet appelait le temps W, et pourtant le RP précédait toujours le temps W. Comme ce marqueur de l'action volontaire précède l'expérience consciente, des chercheurs ont remis en question la notion de libre arbitre et d'action volontaire telle qu'elle a été développée dans des domaines tels que la psychologie, la philosophie, la culture et le droit.

Les chercheurs ont demandé à 52 sujets d'appuyer à volonté sur un bouton, pendant qu’un électro-encéphalogramme enregistrait l'activité cérébrale, et qu’une ceinture thoracique enregistrait la respiration et l'activité cardiaque. Les résultats montrent que le RP et l'action volontaire (appuyer sur le bouton) sont liés aux états corporels internes, et en particulier au cycle respiratoire, mais pas au rythme cardiaque.

Tout en restant totalement inconscients du lien respiration-action, les participants déclenchaient plus fréquemment une action volontaire lors des expirations que lors des inspirations. Pour Hyeong-Dong Park, principal auteur de ces travaux, «le RP ne correspond plus uniquement à l'activité corticale qui prépare de manière inconsciente l'action volontaire. Le RP répond au moins partiellement au processus cortical lié à la respiration et couplé à l'action volontaire».

«De façon plus globale, cela suggère que les contrôles moteurs de plus haut niveau, tels que les actions volontaires, sont déterminés ou influencés par les actions motrices involontaires et cycliques de nos organes internes, en particulier les poumons», ajoute le spécialiste.

Ces résultats suggèrent que le schéma respiratoire peut être utilisé pour prédire "quand" les gens commencent à agir volontairement. Vos schémas respiratoires pourraient également être utilisés pour prédire le comportement des consommateurs, comme lorsque vous cliquez sur ce bouton. Les appareils médicaux qui utilisent des interfaces cerveau-ordinateur pourraient être réglés et améliorés en fonction de la respiration. Le couplage entre la respiration et l'action pourrait être utilisé dans la recherche et les outils de diagnostic pour les patients présentant des déficits dans le contrôle de l'action volontaire, comme les troubles obsessionnels compulsifs, la maladie de Parkinson et les syndromes de Tourette. Blanke et Hyeong-Dong Park, premier auteur de cette recherche, ont déposé un brevet basé sur ces résultats.

Commentaires pour les coachs de santé

Ces découvertes ont une implcation importante dans les démarches d'accompagnement, en en particulier lors de la définition d'un état désiré (objectif ou intention) 
Si vous voulez que le sujet sorte de ses automatismes (décisions inconscientes de ses programmes mentaux) pour activer son libre arbitre et prendre une décision consciente, demandez lui d'exprirer lentement pendant qu'il évoque la destination ou l'orientation qu'il souhaite donner à sa vie.   

Vidéo : https://www.youtube.com/watch?v=kdf6srnVcM0

Sources 

Hyeong-Dong Park, Coline Barnoud, Henri Trang, Oliver A. Kannape, Karl Schaller, Olaf Blanke. La respiration est associée à l'action volontaire et au potentiel de préparation corticale. Nature Communications, 2020 ; 11 (1) DOI : 10.1038/s41467-019-13967-9